La société Applitek a développé un analyseur d’acides gras volatils qui suit en continu les systèmes de digestion des matières organiques. Sa mission : anticiper une dégradation de la flore bactérienne des réacteurs anaérobies.
Son prix de 20 000 euros environ est bien moins élevé que celui d’une réinsémination bactérienne d’un réacteur anaérobie. « C’est le premier argument, le plus convaincant », indique Clément Schambel, responsable commercial de Mesureo, distributeur de ce premier analyseur d’Acides Gras Volatils (AGV) en ligne, l’AnaSense, développé par la société Applitek. Déjà installé ou en test chez les quelques grands exploitants d’eau, l’analyseur présente un intérêt aussi pour les effluents industriels fortement chargés en matières organiques, comme c’est le cas dans les brasseries, les laiteries, les industries alimentaires, pharmaceutiques, textiles… « C’est aujourd’hui, sur ce marché-là que nous cherchons à implanter l’AnaSense », précise M. Schambel.
Dans les stations de traitement chargées de diminuer la masse organique des effluents, les AGV sont issus de la dégradation des lipides par un processus biologique. Il s’agit d’acides légers (acétique, propionique, butyrique…) qui sont ensuite dégradés eux aussi en biogaz (méthane et dioxyde de carbone). Pour que ce processus soit optimal, le pH doit être autour de 7. Cependant, une accumulation d'AGV diminue ce pH et peut entraîner une élimination des bactéries méthanogènes (dernière étape de la fermentation). Une seule mesure de pH ne pourrait-elle pas alors suffire pour surveiller ce processus ? « Ce n’est pas si simple, souligne M. Schambel, car l'état de dissociation des AGV est, lui aussi, directement dépendant du pH ». De plus, si une concentration en AGV de 1 500 mg/l est létale pour les bactéries à pH 7, il en faut trois fois moins à pH 6,5, soit 500 mg/l, pour dégrader le réacteur. « Ainsi, les deux mesures, le pH et la concentration en AGV, sont utiles », précise M. Schambel.
Une titration corrélée à la chromatographie en phase gazeuse
En laboratoire, la méthode classique pour l’analyse des AGV est la chromatographie en phase gazeuse (CG). Celle-ci n’a pas été retenue par Applitek pour une mesure en ligne. Le fabricant a opté pour une titration sur des échantillons prélevés automatiquement. « La méthode par titration est sans doute moins précise mais plus facile à mettre en œuvre et plus facilement automatisable », explique M. Schambel. L’échantillon est dosé dans la cellule de mesure par ajout de HCl avec une burette de précision. Durant l’opération de titration, le pH est mesuré via une électrode spécifique. La concentration en AGV est ensuite reliée à la vitesse de diminution du pH (la courbe de réponse est corrélée à celle obtenue par chromatographie gazeuse). A ces deux paramètres s’ajoute un troisième, suivi également par l’AnaSense : la concentration en bicarbonates, qui est utilisée pour maintenir le niveau de pH et tamponner le milieu. L’appareil fournit une mesure toutes les quinze minutes. Il peut intervenir comme un indicateur d’alarme ou être intégré dans un processus de régulation du réacteur.