D e nos jours, les jauges d'extensométrie électriques sont utilisées en toute fiabilité dans de nombreuses applications. Conçues il y a plus de 50 ans, ces jauges de contraintes sont aujourd'hui abouties techniquement et existent dans de nombreuses versions différentes. Pour certaines applications spécifiques, par exemple les essais avec un grand nombre de cycles de charge ou présentant des perturbations électromagnétiques, les jauges optiques sont toutefois devenues récemment un complément intéressant à la technologie classique des jauges électriques.
Facteur k d'une jauge de contrainte
Dans les applications mentionnées précédemment, les jauges optiques apportent en effet des avantages indéniables, tels qu'une immunité aux perturbations électromagnétiques, une utilisation dans des atmosphères très explosives, l'absence de défaillance mécanique du matériau constituant le capteur (à savoir le verre), même en présence de fortes vibrations, la faible masse des fils de connexion –la fibre de verre est sensiblement plus fine que les fils en cuivre– et une réduction du câblage. Dans ce dernier cas, un fil de mesure permet de raccorder plusieurs capteurs ayant des longueurs d'ondes de base différentes.
Avec des jauges électriques, il est possible d'adapter la sortie de température pour correspondre à différents matériaux, afin que l'erreur due aux variations de température soit aussi faible que possible. La dilatation du composant est compensée à l'aide de la courbe représentant la résistivité en fonction de la température (ici, une courbe typique de la déformation apparente d'une jauge d'extensométrie appariée à de l'acier).
Face à ces deux types de jauges de contraintes, comment les industriels peuvent-ils choisir la technique la plus appropriée à leurs applications ? Cet article propose de comparer les caractéristiques des jauges électriques et optiques, et de proposer des pistes pour trouver la solution optimale à divers problèmes de mesure. Comme il n'existe pas encore de directive répertoriant les caractéristiques des jauges optiques, celles du fabricant allemand HBM ont été testées selon la directive allemande VDI/VDE 2635 (1) « Richtlinie zur Bewertung von
Qu'elles reposent sur une technologie d'extensométrie électrique ou optique, les jauges de contraintes sont utilisées dans de nombreuses applications. Si les jauges électriques sont aujourd'hui matures, les jauges optiques sont particulièrement bien adaptées à certaines applications spécifiques.
Dehnungsmessstreifen mit metallischem Messgitter » (Directive pour évaluer des jauges d'extensométrie à grille de mesure métallique). Pour pouvoir comparer les deux techniques, intéressons-nous d'abord au facteur de jauge k. Pour une jauge d'extensométrie électrique, il se définit de la manière suivante: R = k.e R où R est la résistance de base de la jauge d'extensométrie, R la variation de la valeur de résistance lorsque la contrainte agit sur la grille de mesure, k le facteur k et e la contrainte.
Sensibilité du point de mesure
La variation de la résistance d'une jauge d'extensométrie électrique est due à deux phénomènes physiques (2) . Lorsqu'un conducteur métallique est soumis à une contrainte, il s'allonge et s'amincit. Des études de la géométrie montrent que le facteur k qui en résulte est de 1,6, si le coefficient de Poisson du matériau de la grille de mesure est de 0,3. La résistivité du matériau de la grille de mesure (le second phénomène) connaît également une variation linéaire qui est proportionnelle à la contrainte. C'est pour cette raison que la sensibilité de matériaux de grille de mesure différents est également différente. Le facteur k en résultant est compris entre 0,4 et 0,6. Les deux effets pouvant s'additionner, le facteur k des jauges d'extensométrie électriques s'élève généralement à environ 2. Les jauges de contraintes très petites ont un facteur k plus faible, car l'effet de la variation de la résistance électrique est plus faible.
Les jauges optiques, elles, reposent sur un réseau de Bragg comprenant un grand nombre de points de réflexion inscrits dans la fibre optique selon un espacement régulier. Les contraintes appliquées à une jauge optique modifient alors cet espacement. La longueur d'onde de la lumière réfléchie par ces points avec des interférences constructives dépend ainsi de l'espacement entre les points. C'est la raison pour laquelle la longueur d'ondes du pic de réflexion change lorsqu'une contrainte est appliquée.
Les critères en faveur des jauges optiques
l Mesurage avec un grand nombre de cycles de charge : les jauges optiques permettent de réaliser des essais avec un grand nombre de cycles de charge (tenue en fatigue), même avec des matériaux soumis à de fortes sollicitations. l Compatibilité avec des conditions ambiantes et de fonctionnement difficiles : les jauges optiques peuvent être utilisées même si les perturbations électromagnétiques sont importantes ou si l'atmosphère est très explosive. l Une fibre optique, plusieurs points de mesure (multiplexage) : les jauges optiques nécessitent moins de câblage. Plusieurs jauges optiques peuvent en effet être intégrées dans une seule fibre de verre. La chaîne de mesure optique s'adapte ainsi aux besoins individuels d'une application spécifique. l Faible masse des fils de connexion : le multiplexage et la légèreté de la fibre de verre des jauges optiques réduisent la masse des connexions. L'effet de la masse intrinsèque des connexions sur les résultats d'essai est ainsi très faible comparé à celui dans le cas des jauges électriques. |
Deux phénomènes sont essentiels à la sensibilité du point de mesure (3) .D'une part, sous une contrainte mécanique, l'espacement des points de réflexion augmente; le facteur k pour cet effet est exactement égal à 1, car seul le changement de longueur de la fibre optique entraîne directement un changement dans l'espacement des points de réflexion. Le coefficient de Poisson peut alors être négligé. D'autre part, toujours sous une contrainte mécanique, l'indice de réfraction des fibres optiques et, donc, la distance parcourue par la lu-mièrevarient proportionnellement à la contrainte. Le facteur k s'en trouve réduit d'environ 0,22, de sorte qu'un réseau de Bragg présente un facteur k de 0,78. De manière similaire à l'équation pour la jauge électrique, on obtient:
où est la longueur d'onde de base du réseau de Bragg, la variation de la longueur d'onde lorsque la contrainte agit sur la grille de mesure, k le facteur k et e la contrainte.
Les jauges optiques ont des couches plus épaisses que les jauges électriques. L'erreur de mesure résultante, lors de la mesure de la contrainte de flexion sur des composants fins, ne doit donc pas être négligée. Cependant, elle peut être aisément corrigée de la manière suivante:
où eOF est la contrainte sur la surface du composant, eAnz la contrainte mesurée par la fibre, h l'épaisseur du composant et d la distance entre la fibre et la surface du composant.
« Déformation apparente »
Un autre paramètre est à prendre en compte, à savoir la plage d'utilisation en température d'une jauge d'extensomé-trie.Celle-là est définie comme la plage de température où les capteurs sont capables de mesurer et où les caractéristiques techniques de la jauge ne changent pas sous l'effet de la température. Pour la gamme de produits de HBM, on observe les points suivants: les jauges électriques affichent une plage allant de - 200 à +200°C, pour celles basées sur une trame pelliculaire en constantan de la grille de mesure (série Y), et de - 269 à +250°C, pour les jauges à trame pelliculaire en CrNi (un alliage spécial nickel-chrome ; série C). Les jauges optiques de l'allemand peuvent être utilisées entre 0 et + 80 °C et, plus récemment, de 4°K (soit - 269°C) à +450°C.
Avec des jauges électriques, il est possible d'adapter la sortie de température pour correspondre à différents matériaux, afin que l'erreur due aux variations de température soit aussi faible que possible. La dilatation du composant est compensée à l'aide de la courbe représentant la résistivité en fonction de la température. La figure 1 montre une courbe typique de la « déformation apparente» d'une jauge d'extensométrie appariée à de l'acier.
Parmi les jauges d'extensométrie introduites récemment par HBM, on trouve notamment la série de jauges électriques KFU pour les températures jusqu'à + 350 °C, ainsi que la famille de jauges optiques à réseau de Bragg FS62.
Actuellement, les jauges optiques n'offrent aucune possibilité d'auto-compensation. Ainsi, en cas de variations de température au niveau du point de mesure, la déformation du composant et le changement au niveau de la longueur d'onde du pic de réflexion sont tous deux affichés. Le changement de longueur d'onde est dû à la variation de l'indice de réfraction sous l'effet de la température. Ce changement est d'environ 8µm/m/K. La figure 2 compare la sortie de température d'une jauge optique installée sur du quartz, de l'acier ou de l'aluminium et la sortie d'une jauge électrique appariée à l'échantillon d'essai. En général, la forte dépendance du point zéro des jauges optiques vis-à-vis de la température nécessite une compensation, ce qui est fait soit par mesure de la température, soit en utilisant des points de mesure de compensation thermique passive. La reproductibilité de la courbe de température des jauges optiques est alors très bonne.
HBM a par ailleurs testé la résistance aux charges alternées à long terme de ses jauges optiques, dans un champ de déformation constant avec une déformation alternée de ± 1 000 µm/m. Aucune variation des caractéristiques de mesure ou du pic de réflexion n'a été observée après 10 7 cycles de charge, c'est-à-dire que la sensibilité et la longueur d'onde de base sont restées inchangées. Les jauges électriques ont des caractéristiques similaires. Elles génèrent toutefois un changement irréversible du zéro qui s'élève, pour les meilleures jauges de contraintes, à environ 10µm/m.
Les jauges optiques de l'allemand utilisent des fibres optiques fabriquées sur une tour de fibrage. Par rapport aux jauges électriques, les jauges optiques supportent des pics de charge sensiblement plus élevés et offrent une résistance aux charges alternées plus élevée en termes d'amplitude.Des études antérieures (3) ont montré que les réseaux de Bragg issus de la tour de fibrage ne peuvent quasiment pas être détruits par des effets de fatigue dus à des déformations habituelles de ±2000µm/m.
Allongement maximum et rayon minimum
Enfin, l'allongement maximum a été déterminé d'une manière analogue aux jauges électriques. Pour cela, les échantillons ont été soumis à une contrainte de flexion surveillée au moyen d'un capteur de déplacement.Avec des jauges d'extensométrie métalliques, la déformation maximale est considérée atteinte lorsque le signal de mesure converti en déformation dévie de plus de 5% de la déformation spécifiée.Cette méthode ne peut pas être utilisée avec des jauges optiques, car l'algorithme d'évaluation utilisé détermine les pics de réflexion pouvant encore être évalués.
La déformation maximale spécifiée par HBM pour ses jauges optiques correspond à la déformation pour laquelle le pic reste sans ambiguïté. Dans ce graphique représentant quatre capteurs différents avec un niveau de déformation de 0,5 %, les jauges électriques connaissent des déformations maximales qui peuvent atteindre 10 %, selon leur conception. En ce qui concerne le rayon de courbure, la valeur minimale pour les jauges optiques de HBM est de 25 mm. En installant des patchs sur ce rayon, le point de mesure fonctionnera correctement. Les jauges électriques atteignent, quant à elles, un rayon minimum de 0,3mm.
La déformation maximale spécifiée par HBM pour ses jauges optiques correspond donc à la déformation pour laquelle le pic reste sans ambiguïté –le pic principal se trouve 4dB au-dessus du pic secondaire. La figure 3 montre le spectre de quatre capteurs avec un niveau de déformation de 0,5%. Les jauges électriques connaissent des déformations maximales qui peuvent atteindre 10 %, selon leur conception (série D de HBM). En ce qui concerne le rayon de courbure, la valeur minimale pour les jauges optiques de HBM est de 25mm.En installant des «patchs» sur ce rayon, le point de mesure fonctionnera correctement. Les jauges électriques atteignent, quant à elles, un rayon minimum de 0,3mm.
En améliorant encore sa gamme de produits dédiés à l'analyse expérimentale des contraintes, HBM a donc fait de ses jauges optiques une alternative attractive et performante dans de nombreux champs d'application. Sachant que les jauges optiques brevetées peuvent être installées de la même manière que celle des jauges électriques, un avantage facilitant grandement la décision entre les deux technologies.