Des Solutions Pour Mieux Gérer L'air Comprimé

Le 01/06/2012 à 14:00

Il est facile de connaître le prix d'un mètre cube d'eau, d'un mètre cube de gaz naturel, celui d'un litre d'essence,de gasoil ou celui du kW/h. Mais qui connaît le prix d'un mètre cube d'air comprimé à 3 bars à 6 bars ou à 12 bars?

«A tort,l'air est considéré comme étant quasi gratuit. C'est le quatrième fluide utilisé, toutes industries confondues et en moyenne, 10 % du courant consommé dans les ateliers sert à produire de l'air comprimé. Pour la chimie, ce taux grimpe à 20 % et il se situe aux alentours de 15 % dans les secteurs du pétrole et du charbon », explique Claude Schelcher, chef de marché énergie chez Endress+Hauser.

L'air comprimé est requis pour le fonctionnement des machines, des moteurs rotatifs, des vérins, des distributeurs, des systèmes de contrôle, de convoyage ou de nettoyage.

Les occasions de pertes sont multiples et pour en avoir une idée, le constructeur suisse aligne plusieurs types de capteurs, débit, pression, températures… susceptibles de donner l'état d'une installation en temps réel. D'une manière très élémentaire, outre la réduction des fuites, les mesures d'économie d'énergie consistent à maintenir un réseau avec une pression aussi basse que possible et, une alimentation du compresseur en air aussi frais que possible pour en améliorer le rendement.

Mais, dans un contexte industriel, est-il vraiment nécessaire d'évaluer correctement un budget air, et comment appréhender le sujet ? « Sur 20 ans d'exploitation d'une installation d'air comprimé, le coût de l'investissement de départ (compresseur plus réseau) représente seulement 13 %, la maintenance, 12 % alors que les 75 % restant sont absorbés par le prix de l'énergie ce qui est considérable », indique Claude Schelcher.

Pour la bonne gestion de l'air comprimé, la règle de base consiste à maintenir le réseau sous une pression aussi basse que possible.

Flexim

Avant tout, il s'agit de bien évaluer ses besoins car les coûts de production d'air comprimé industriel, augmentent d'environ 6 à 10 % pour chaque bar de pression inutile.

Ensuite, il s'agit d'être attentif car, une fuite d'un millimètre dans une conduite d'air peut induire des coûts supplémentaires de 120 euros par an. Par conséquent, 50 à 80 fuites de cette nature entraînent des pertes annuelles de 6000 à 9500€.

Fuites et pertes de charges sont bien entendu, les “bêtes noires” d'un réseau d'air.

Mais quel est le prix à payer pour une inspection soignée des fuites? Quelles ressources faut-il avoir à disposition pour analyser la génération et la qualité de l'air d'un circuit ? Comment s'y prendre pour faire un bilan sur une usine en-tière? Comment interpréter les résultats obtenus? Quels seront les composants à changer ou à réparer?

En outre il n'y a pas que les fuites ! « Une perte de charge de 300 millibars représente un surcoût annuel de 800 e pour un compresseur de 75 kW qui va fonctionner 6 000 heures par an (environ 16 heures par jour) C'est typiquement le cas d'un filtre qui se colmate », poursuit Claude Schelcher.

L'essentiel

Evaluer exactement les besoins d'un réseau en effectuant des simulations informatiques.

Envisager une pression d'air unique qui sera la plus basse possible.

Si besoins locaux d'une pression plus élevée, avoir recours à des amplificateurs ou surpresseurs.

Comparer régulièrement les caractéristiques d'un réseau avec ses performances initiales.

Maintenance régulière, changement des filtres et remplacement systématique des composants défectueux.

Expertises par spécialistes

Pour cerner ces anomalies de réseau, le Memograph M développé par le constructeur helvétique est un appareil qui enregistre la consommation énergétique des installations en fonction des pertes. Il totalise, par exemple, les performances additionnelles de plusieurs compresseurs, surveille les valeurs de consignes telles que pressions différentielles et émet des alarmes lorsque les valeurs limites ont été dépassées par excès ou par défaut.

Pour traiter les informations concernant l'état physique d'un réseau, eSight est une solution logicielle complète et intuitive pour la surveillance avec suivi des consommations. Ce programme propose plusieurs techniques d'analyse adaptées aux aspects de la gestion des données liées à l'énergie. Il est disponible en ligne (solution hébergée) ou est installé sur site. Les données sont soit importées automatiquement à partir d'enregistreurs ou issues de la supervision d'un système de production. Evolutif, adapté à tous les secteurs industriels et à toute taille d'entreprises, il s'interface avec des produits Endress+Hauser ou avec ceux de la plupart des autres fabricants du secteur.

Le progiciel fournit des rapports sous forme de texte, tableaux et graphiques adaptés à toute société, tout site et mode de comptage. Il autorise les acquisitions de données sous différents formats, édite les rapports d'anomalies, déclenche des émissions d'alarmes sous forme de rapports, d'e-mail ou de SMS. Ses utilisateurs peuvent créer des compteurs virtuels, effectuer des calculs de suivi d'efficacité énergétique puis comparer des sous-compteurs au compteur principal ou avec des regroupements de données.Les résultats sont utilisés dans les synthèses d'analyses énergétiques comme avec des compteurs réels.

La qualité optimum d'un réseau d'air comprimé demande la vérification régulière des débits, pressions, point de rosée et une détection ultrasonique des petites fuites.

SMC

Afin de surveiller l'état physique d'un réseau d'air, les données sont, importées à partir d'enregistreurs ou fournies par la supervision d'un système de production.

IFM

Autre système préconisé par Asco Numatics pour dimensionner les réseaux: le logiciel métier Transair Flow Calculator édité chez Parker-Legris. C'est un outil simple et rapide à utiliser en saisissant le débit du compresseur, la longueur du réseau principal bouclé ou non et la pression de service. L'ensemble est dimensionné avec la section des conduites le mieux adapté à l'étude d'un projet. Ce logiciel estime les pertes de charge et le débit maximum possible.

En seulement trois séquences, il détermine le diamètre des tubes appropriés au réseau. C'est un programme intuitif pour chaque étape afin de dimensionner la distribution d'air comprimé au niveau canalisations.

Chez SMC, numéro un mondial de l'air comprimé, on préconise les audits sur tout ou partie de l'usine. Ils sont réalisés par des spécialistes qui interviennent auprès des clients souhaitant améliorer ou entretenir leur réseau d'air comprimé. « En fonction de la mission à effectuer, une équipe de deux à quatre techniciens intervient durant une à quatre journées pour analyser les débits, pressions, températures, points de rosée et consommations, que ce soit sur une machine, un atelier ou l'ensemble d'une usine », explique Emmanuelle Loget, responsable marketing et communication chez SMC France.

Tendance observée par le fournisseur nippon, l'expertise d'un réseau est une question de spécialistes professionnels et de nombreux industriels n'hésitent pas à externaliser maintenance et remise à niveau de leurs réseaux d'air comprimé, depuis le compresseur jusqu'aux postes de travail. « Ces travaux se concentrent sur une machine, sur une cellule de production voire tout un atelier. Pour finaliser l'étude, les données sont compilées et détaillées sous forme de rapports, base de travail pour améliorer l'existant », confirme Emmanuelle Loget.

Logiciels gratuits

Si l'utilisateur souhaite réaliser lui-même son bilan, SMC met, à la disposition de ses clients et partenaires, un logiciel d'assistance à l'autodétection ALDS ( Automatic Leak Detection System ) sur internet. Installé sur un PC auquel se rapportent les données relatives aux pressions et débits, ce programme met en évidence fuites et pertes de charges puis émet un rapport détaillé de manière à envisager une nouvelle installation ou l'amélioration de l'existant. Ce fournisseur qui aligne plus de 680000 références préconise sa gamme de composants économes en énergie types VXE pour les électrovannes,VQC ou SY pour les distributeurs, MGZ pour les vérins,VBA pour les sur presseurs et PFM pour les appareils de mesure notamment les débitmètres. De son côté, Bosch Rexroth propose des solutions matérielles et travaille à la progression du rendement de ses produits. La firme accompagne ses clients depuis la conception des machines pneumatiques jusqu'à leur développement et leur mise en service. Son expérience de terrain se concentre sur l'efficacité énergétique des réseaux d'air en réduisant les consommations tout en préservant la productivité. Le fournisseur accompagne ses acheteurs durant le cycle de vie de leur outil de production, depuis la conception jusqu'à la livraison ou la modernisation, en passant par le développement et la mise en service.Avec cette démarche d'efficacité énergétique (4EE), Bosch Rexroth corrige ses systèmes par le biais de régulations et d'automatismes (configuration, programmation), via la mesure, le monitoring et la maintenance.

Environ un cinquième des coûts indirects d'un réseau d'air sous pression lié à une unité de fabrication est imputable à la maintenance.

Endress+Hauser

La firme allemande propose des solutions en ligne avec catalogues, calculateurs, configurateurs et programmes de calcul de consommation.Tout ingénieur ou technicien utilisateur dispose de logiciels de conception pour ses schémas qui servent à dimensionner les projets pneumatiques. Par simulation, chacun évalue l'impact économique et l'efficacité énergétique d'une installation dès le projet. Le client évite les calculs manuels et vérifie le dimensionnement et la combinaison des composants retenus, puis effectue son choix en fonction d'un cahier des charges mais aussi de critères d'économies d'énergie et de coûts.

Pour des applications à haut rendement énergétique, le calculateur détermine la quantité d'air requise, calcule le besoin en énergie des différentes configurations à partir des heures de service, du prix du kilowattheure et suivant la puissance du compresseur. Il compare les effets des différents diamètres de vérins selon la pression d'utilisation, la longueur et le diamètre des conduites d'air avant de déduire la combinaison la plus efficace en termes économiques. Des configurateurs proposés avec le catalogue en ligne aident à la sélection de la solution technique la plus appropriée. Au terme de sa configuration, l'utilisateur a la possibilité de télécharger un dossier complet contenant la fiche technique, le plan coté, la nomenclature, le schéma de principe et les données CAO. Générées en 2D ou 3D, elles sont téléchargeables pour être intégrées dans des plans de conception. Le client visualise de manière directe et dynamique son installation en 3D. Gratuit, le logiciel de conception des schémas pneumatiques D&C Scheme Editor 3.0, reste intuitif pour créer des schémas même complexes et conformes aux normes en vigueur.

Monitoring des réseaux

Pour Festo, ces questions de dimensionnement et d'exploitation de réseaux restent affaire de spécialistes. Deux solutions se présentent en fonction de la taille de l'entreprise. Soit former une équipe technique sûre de réaliser l'expertise dans les meilleures conditions, soit externaliser le bilan de l'installation qui sera sous-traitée. Mais une fois l'installation opérationnelle, attention aux dégradations et aux dérives qui peuvent survenir au cours du temps. Selon Rockwell Automation, 15 à 40% des coûts indirects d'une unité de production sont imputables à la maintenance et aux réparations. La moitié environ de ces coûts peut être évitée en utilisant des systèmes de diagnostic et de surveillance des conditions de fonctionnement. Ces remarques concernent la production et la gestion de l'air comprimé car les fuites accumulées dans l'espace et dans le temps représentent un gouffre énergétique donc financier. Mais selon une autre étude menée par le Fraunhofer Institute (Allemagne) et intitulée “Réseaux d'air comprimé en UE”, une bonne dose d'économie d'énergie est envisageable dans pratiquement toutes les entreprises européennes. En effet, un bilan global démontre que 12 % des économies proviendraient d'une conception initiale des réseaux en pression multiples, à prohiber. Des gains énergétiques sont possibles en récupérant la chaleur dissipée par les compresseurs (environ 10% des pertes actuelles) pour par exemple chauffer de l'eau sanitaire. Autre option, des compresseurs avec moteurs à vitesse variable pourraient générer 10% de gains supplémentaires. Enfin, la suppression des fuites annihilerait 42% des pertes. Les entreprises manufacturières, tenues d'accroître continuellement leur productivité doivent aussi prendre en compte le coût global d'une installation pendant toute sa durée de vie. Le simple prix d'achat du matériel et de sa mise en place, environ 15% du coût d'exploitation sur son cycle de vie, ne fait généralement partie que des plus petits postes de dépenses alors que la maintenance et les réparations représentent jusqu'à 40% du budget global. Il s'agit donc de pratiquer une maintenance axée sur l'état réel d'un réseau en détectant à temps ses défauts pour diminuer les immobilisations et garantir la qualité d'un “process”.

Les méthodes de production d'air

La compression dynamique La compression dynamique transforme la vitesse de l'air en pression. Elle fait appel aux compresseurs centrifuges et aux compresseurs axiaux.

La compression volumétrique La compression volumétrique réduit un volume d'air initial. Elle utilise des machines alternatives (le plus souvent à piston) et rotatives (compresseurs à vis, à palettes, à engrenages et à anneaux liquides). En aval des compresseurs, on trouvera un réservoir tampon qui permet d'obtenir momentanément une distribution d'air supérieure au débit délivré par le compresseur. Ce réservoir sert aussi à JUINntenir une pression quasi constante dans le circuit.

Enfin, il refroidit l'air comprimé afin de récupérer les condensats. Vient ensuite un sécheur qui diminue la teneur en vapeur d'eau contenue dans l'air comprimé puis une batterie de filtres qui limitent la concentration des particules d'huiles et d'eau véhiculées dans le flux d'air envoyé dans le réseau de distribution.

Pour réduire la facture énergétique, il est possible d'associer le compresseur à un dispositif de récupération de chaleur pour préchauffer de l'eau chaude sanitaire à 50°C par exemple.

Un monitoring installé directement sur un actionneur, ici un vérin, permet d'observer le comportement du composant afin de déceler une variation de ses performances par rapport à ses caractéristiques initiales.

Bosch Rexroth

S'appuyant sur les résultats de ces études, Festo a développé un outil de supervision baptisé Energy Monitoring GFDM qui mesure la pression, le débit et la consommation par cycle d'une installation et en assure une surveillance avec optimisation de l'efficacité énergétique.

Naturellement, l'air comprimé s'économise en chassant les fuites et en observant la dégradation des consommations par rapport à une valeur initiale de référence. Le Monitoring GFDM comprend un ensemble d'appareils de surveillance qui observent et analysent l'air comprimé en collectant automatiquement les paramètres de fonctionnement de références. Celles-ci sont comparées aux valeurs de consignes. La surveillance aide l'utilisateur à déceler des dérives de façon à intervenir avant toute perte de qualité puisque le GFDM surveille pression, débit et consommation par cycle pour une installation ou une machine afin d'en certifier l'efficacité énergétique. Grâce à l'utilisation intuitive du progiciel d'exploitation, l'implantation, la mise en service et l'emploi du GFDM ne demandent pas de qualification spéciale du personnel de maintenance. Cependant, Festo propose une assistance additionnelle sous forme de services. Il s'agira, par exemple, du paramétrage ou bien, de l'implantation du système dans une armoire de commande. Cette solution est utilisée, depuis, 2007 par le constructeur pour ses propres besoins, dans son unité de fabrication de distributeurs. Elle surveille le chargement des magasins de cartouches filtrantes et l'insertion du distributeur d'air comprimé tout en contrôlant l'étanchéité. La cellule de production d'air fait appel à de gros vérins ayant une consommation importante.

Tendre vers le zéro fuite

Le Monitoring GFDM comprend des capteurs de débit, un capteur de pression, un contrôleur de diagnostic ainsi qu'un outil de visualisation à monter directement sur machine. Son logiciel d'exploitation Scada VipWin est implanté sur PC. Une fonction intuitive d'apprentissage («Teach In») en simplifie l'utilisation. Jusqu'à 16 procédés de production sont surveillés sur une même supervision. Celle-ci est installée sur l'unité de production ou, en mode déporté, dans un bureau sur un PC.Le GFDM fait apparaître les potentiels d'économies, réduit la consommation d'air comprimé, augmente la sécurité des procédés et améliore la disponibilité des installations. De plus les composants pneumatiques et les commandes de mouvements de dernière génération affichent selon le constructeur une consommation réduite de 30% par rapport au matériel traditionnel.

A titre d'exemple,un module de mesure spécifique peut équiper un vérin pneumatique ou encore un module doté de quatre capteurs de pression, remplace des capteurs individuels de terrain pour plus de compacité.

IFM Electronic propose aussi des capteurs et des contrôleurs de débit à installer sur les réseaux d'air comprimé. Ces produits se sont largement démocratisés ces dernières années. L'approche du constructeur allemand est d'appréhender et de quantifier dès la phase d'investissement les économies d'énergie potentielles. L'air comprimé est une énergie urgente facile à obtenir mais qui est directement tributaire du coût de l'électricité. Pour Claude Perruisset, chef de produits, « Il est impossible de faire du zéro fuites,mais des installations vieillissantes représentent souvent un potentiel d'économies significatives (raccords flexibles qui se dégradent,vibrations,fentes,…).Des outils d'analyse donnent une image d'une machine en fonctionnement et de son cycle de travail et de ses périodes d'arrêt.En principe,cet arrêt devrait engendrer un débit nul ce qui est rarement le cas et met en évidence les fuites.Un comptage permet alors de faire un état des lieux ce qui n'est pas possible en phase de fonctionnement ».

En moyenne, 10 % du courant utilisé dans les ateliers sert à produire de l'air comprimé. Une supervision associée à la gestion rigoureuse des réseaux d'air est synonyme d'économies.

Endress+Hauser

IFM Electronic propose une gamme d'instrumentation adaptée à la surveillance du réseau pneumatique depuis la sortie du compresseur jusqu'aux actionneurs. Mais avant tout investissement, il faut se poser les bonnes questions: sachant que plus un circuit est étendu, plus il y a de risque de fuites et de pertes de charge, faut-il un compresseur avec un vaste réseau ou bien faut-il installer deux compresseurs à deux endroits différents ? Ou, faut-il alimenter tout un réseau en 12 bars alors que quelques endroits seulement exigent une telle pression? Des amplificateurs de pressions (surpresseurs) ne sont-ils pas préférables ? Faut-il produire en continu alors que deux ou trois heures suffisent dans la journée? Bref, quels sont les véritables besoins en fonction des pics et des creux de consommation? «Après analyse et simulations, les réponses seront toujours sources d'économies », conclut Claude Perruisset.

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