S pécialiste de l'instrumentation radiofréquence et radiocom, le groupe allemand Rohde & Schwarz a, depuis une douzaine d'années, bâti sa stratégie de développement en tirant les leçons de 2001, lorsque la société avait subi de plein fouet l'explosion de la bulle internet avec pour conséquence une chute vertigineuse du chiffre d'affaires de la société en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Aujourd'hui, même si la communication radio reste le point commun à ses activités, le groupe n'est plus uniquement dépendant de la seule activité de test et mesure radiofréquences et de télécommunications.
Lors de la décennie écoulée, il s'est en effet évertué à se diversifier dans des activités complémentaires telles que la radiodiffusion,les radiocommunications sécurisées ou bien encore la radiolocalisation.
Conquérir de nouveaux marchés tels que celui de l'oscilloscopie
Il se met ainsi à l'abri d'éventuels gros trous d'air tels que celui subi en 2001, les cycles des secteurs visés par ses activités complémentaires étant suffisamment différents pour rendre fort improbable une baisse d'activité aussi forte qu'il y a 12 ans. Peu adepte de la croissance par voie d'acquisitions, sauf si l'enjeu est d'acquérir une technologie ciblée, la société n'a pas hésité à mettre en avant sa propre expertise technologique et à investir en interne pour conquérir de nouveaux marchés. C'est ainsi qu'en 2010, le fabricant s'est invité sur le créneau des oscilloscopes. Une manière là encore d'assurer ses arrières en visant un marché important qui, de surcroît, continue à croître et est relativement peu sujet aux fluctuations et aux soubresauts économiques compte tenu de la diversité des secteurs d'activités utilisant ce type d'équipements de mesure. « La décision avait alors été prise, car les autres marchés étaient en saturation et aujourd'hui, nous souhaitons devenir un acteur important de l'oscilloscopie », précise Jean-Christophe Prunet, président de Rohde &Schwarz France. R&S vise les modèles d'entrée et milieu de gamme et se veut un généraliste de l'instrumentation, au même titre qu'Agilent Technologies en qui l'allemand voit son principal concurrent sur ce créneau. Depuis le début de l'année 2013, le groupe a confié la vente de ses oscilloscopes à un distributeur exclusif, en l'occurrence Distrame, une pratique jugée plus efficace par le groupe, en particulier pour trouver de nouveaux clients. La vente en direct est assurée dans le cas de certains gros clients.
Au global, force est de constater que cette stratégie globale de diversification a porté ses fruits puisque ce groupe familial allemand, qui, rappelons-le, a été créé il y a 80 ans et emploie environ 9300 salariés, a tutoyé pour la première fois la barre des 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires (1,9Mde exactement) sur l'exercice fiscal 2012-2013, clos le 30 juin dernier. Cela avec une progression dans tous les secteurs d'activités couverts par le groupe (télécoms, aéronau-tique, broadcast, défense, etc.).A titre de comparaison, sur l'exercice 2010-2011, R&S avait réalisé des ventes annuelles de 1,6 milliard d'euros avec un effectif de 8400 personnes.Alliant expertise technologique et pragmatisme, comme c'est souvent le cas pour les sociétés d'outre-Rhin, le groupe munichois dispose d'une usine centralisée et a notamment développé un centre de compétence pour développer des technologies utilisables dans plusieurs types de produits, afin de réduire ses coûts.
Jean-Christophe Prunet, président de Rohde &Schwarz France : « Il reste de l'investissement en France qui demeure un grand pays de l'électronique en Europe, un pays qui résiste bien et affiche une bonne dynamique, par rapport à d'autres comme ceux de la Scandinavie par exemple. »
DR
En France, la société compte 150 personnes en intégrant les 40 salariés d'Arpège, une entreprise située à La Ciotat, spécialisée dans le domaine de la radio-surveillance des satellites, société que Rohde &Schwarz avait rachetée en 2007.Après une forte croissance il y a deux ans, en particulier avec un boom du test et mesure –qui a donné lieu à des prises de commandes annuelles grimpant jusqu'à 80 millions d'euros– la filiale française a depuis quelque peu marqué le pas avec un chiffre d'affaires annuel de l'ordre de 55 millions d'euros aujourd'hui. « On ne peut pas vraiment parler de crise des marchés, mais plutôt d'un tassement de l'activité en France. Rohde &Schwarz France reste toutefois la plus importante filiale européenne du groupe, si l'on excepte la Russie », précise M. Prunet qui y voit des raisons d'afficher un certain optimisme: « Il reste de l'investissement en France, qui demeure un grand pays de l'électronique en Europe, un pays qui résiste bien et affiche une bonne dynamique par rapport à d'autres comme ceux de la Scandinavie par exemple ».
Toutefois, M. Prunet, qui est également président de la commission sur l'attractivité des métiers à la Fieec (Fédération des industries électriques, électroniques et de communication), se montre plus inquiet quant aux problèmes de recrutement de personnels qualifiés dans le domaine de l'électronique, en particulier en techniciens supérieurs. « En 10 ans, les diplômés issus des IUT de la filière électronique ont chuté de 4 500 à 3 000 par an. Et la chute est tout aussi sévère pour les BTS », déplore-t-il.