Pour fonctionner efficacement, les usines basées sur les cellules nécessitent des robots mobiles intelligents capables de connaître l'environnement dans lequel ils évoluent et de calculer le meilleur itinéraire entre divers points.
Mesures. Quelles sont les principales tendances de l'industrie à l'heure actuelle ?
Bruno Adam. Il existe une nette tendance à l'automatisation en vue de mettre en œuvre une stratégie du type Industrie 4.0 ou industrie du futur. La plupart des fabricants souhaitent stimuler leur productivité grâce à une surveillance accrue des processus et des machines. Les améliorations apportées par l'automatisation permettent d'aider les fabricants, qui subissent beaucoup de pression de la part des clients, et même de certains gouvernements, à augmenter leur productivité.
Une autre tendance intéressante réside dans la personnalisation des produits. Les fabricants ont énormément appris de la réussite de la campagne de marketing « Share a Coke » de Coca-Cola. La campagne permettait aux clients d'acheter des canettes de boisson gazeuse avec une étiquette à leur nom. Cet exemple a été suivi avec succès par d'autres marques, comme Nutella et Marmite. En dehors de la grande consommation, les fabricants savent que la possibilité d'offrir davantage de choix au client leur permettrait d'augmenter leurs ventes. Mais pour y parvenir, ils ont besoin de repenser leur façon de fonctionner. Heureusement, l'automatisation repré-sente une des clés leur permettant de se rapprocher de cet objectif.
Mesures. En quoi cela change-t-il la donne par rapport à la manière de faire actuelle ?
Bruno Adam. La philosophie actuelle du secteur manufacturier est basée sur la ligne de production linéaire. Cela fonctionne bien pour une demande élevée en produits identiques. Mais ce n'est plus aussi efficace pour livrer le même volume de marchandises tout en offrant une plus grande variété de choix. C'est pourquoi certains fabricants à l'avant-garde se dirigent vers une approche fondée sur des cellules – c'est-à-dire sur un environnement non linéaire – pour augmenter la diversité de leur offre. Mais ce n'est pas sans entraîner de nouveaux défis. Les convoyeurs sont parfaits sur une ligne de production standard, mais pas dans un environnement non linéaire. Pour les flux de production plus complexes, la manipulation manuelle est la seule véritable alternative aux convoyeurs. De fait, l'approche basée sur les cellules a entraîné une augmentation du personnel en charge de récupérer les produits semi-finis entre les cellules à l'aide de chariots de transport et de chariots-élévateurs. Cela va à l'encontre de la recherche d'efficacité et de rentabilité que devrait apporter l'automatisation.
Bruno Adam, directeur des projets mobiles chez Omron Europe
Depuis le lancement commercial d'Omron Mobile Robots en Europe en 2013, Bruno Adam gère une équipe responsable de l'identification des principaux marchés et applications requérant de la flexibilité dans le transport et les transferts de pièces. Le département en question est soutenu par une équipe d'ingénieurs d'applications et d'ingénieurs logiciels dont le but est de déployer la technologie dans le domaine industriel en Europe. M. Adam représente régulièrement Omron en tant que conférencier à divers sommets et séminaires en lien avec l'industrie. |
Cela fait quelque temps déjà qu'Omron travaille sur les robots mobiles autonomes, et le groupe a récemment lancé sa gamme LD de véhicules intelligents autonomes (VIA).
Mesures. Comment surmonter ces défis ?
Bruno Adam. Les robots mobiles semblent être la réponse. La première vague de robots mobiles – ce que l'on appelle les véhicules à guidage automatique [ou AGV pour Automated Guided Vehicle, ndlr] – fonctionnait en réagissant aux objets physiques. Ils suivaient généralement une ligne de peinture au sol ou des aimants ; d'autres étaient dirigés par un marquage spécifique sur les murs. Pourtant, ils pâtissent du même inconvénient que les convoyeurs et ne sont utiles que pour transporter les produits entre deux points définis. Pour leur permettre de continuer à fonctionner, la modification d'un point entraîne celle de tout l'environnement, ce qui est long et coûteux. Pour fonctionner efficacement, les usines basées sur les cellules nécessitent des robots mobiles intelligents capables de connaître l'environnement dans lequel ils évoluent et de calculer le meilleur itinéraire entre divers points. De tels véhicules n'étaient pas utilisés jusqu'à maintenant pour deux raisons. D'abord, ils manquaient de puissance de traitement brute disponible pour traiter la complexité des algorithmes d'intelligence artificielle requis pour un fonctionnement autonome, ou du moins d'une capacité de traitement capable de fonctionner sur une batterie suffisamment petite pour le robot. De plus, la technologie derrière les capteurs Lidar n'était pas encore suffisamment mature pour permettre aux robots de naviguer en toute sécurité. Ces obstacles ont maintenant été surmontés grâce au progrès technologique de ces dernières années, notamment dans le domaine de l'électronique et des logiciels. Cela fait quelque temps déjà qu'Omron travaille sur les robots mobiles autonomes et le groupe a récemment lancé sa gamme
Pour se mouvoir dans des environnements complexes et étriqués, les véhicules intelligents autonomes (VIA) doivent être en mesure de calculer des trajectoires complexes en prenant en considération la forme du véhicule et de sa charge.
LD de VIA (véhicules intelligents autonomes) qui était en démonstration au salon Global Industrie en mars dernier (
Mesures. Comment fonctionnent ces véhicules intelligents autonomes ?
Bruno Adam. Le robot doit d'abord faire le tour de l'usine et pouvoir scan-ner l'environnement avec son capteur Lidar principal. Il compile ensuite ces informations pour former une carte statique complète du lieu de travail à une hauteur de 200 millimètres. Cette carte contient des informations sur le mobilier, les machines, les murs et les portes. Le robot utilise la carte pour calculer le meilleur itinéraire entre deux points. Quand plusieurs véhicules sont nécessaires pour accomplir les tâches, ceux-ci ne fonctionnent pas complètement seuls. Le logiciel de gestion de flotte agit comme un planificateur pour les VIA. Il est crucial au fonctionnement puisqu'il calcule l'emplacement du robot mobile le plus proche de la machine ayant fait une requête, puis il attribue la requête à ce robot. Le logiciel de gestion de flotte peut également informer le VIA des secteurs très fréquentés, de sorte qu'il intègre ces informations dans ses calculs. Le logiciel doit communiquer à la fois avec les VIA et les machines, tout en gardant la trace de l'emplacement de chaque VIA. En fonctionnement, le capteur Lidar fournit au VIA un champ de vision à 220 degrés qui lui permet d'éviter, en toute sécurité, tous les objets sur son chemin et d'adapter sa vitesse en temps réel, en fonction de l'environnement. Des capteurs Lidar verticaux de chaque côté du VIA soutiennent le capteur principal. Ces deux capteurs vérifient l'absence d'obstacles et de déversements sur le sol qui pourraient entraver l'itinéraire du VIA, ainsi que les objets suspendus, comme les fourches d'un chariot élévateur ou des tiroirs ouverts.
Le VIA d'Omron en vedette à Global Industrie
l Lors du salon Global Industrie qui s'est déroulé du 27 au 30 mars 2018 à Paris Nord Villepinte, les visiteurs ont pu découvrir une usine connectée grandeur nature sur 1 000 m 2 au cœur du salon, montrant une chaîne complète de fabrication de médailles en fonctionnement. l Destinée à faire la démonstration des solutions de plus de 70 fournisseurs d'équipements, parmi lesquels Omron, l'usine connectée de l'exposition Global Industrie a sans nul doute constitué l'un des atouts majeurs de l'événement. Chaque visiteur pouvait ainsi assister à toutes les étapes de fabrication et d'emballage de sa médaille personnalisée qu'il pouvait récupérer en bout de chaîne (sauf en fin de salon où le stock de médailles était épuisé, les organisateurs ayant été pris de cours par le succès de l'opération). l Les véhicules intelligents autonomes (VIA) de la série LD d'Omron faisaient partie du dispositif ( |
Mesures. Il n'existe aucune solution unique adaptée à toutes les applications industrielles. Les VIA peuvent-ils être personnalisés ?
Bruno Adam. En effet, et les VIA LD d'Omron en sont l'exemple, les VIA peuvent être configurés de différentes façons. La base du VIA reste la même, mais la partie supérieure peut être modifiée en fonction de l'application. Il existe trois configurations de base, à savoir : plateforme, convoyeur et transporteur de chariot.
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Les VIA à plateforme fonctionnent de manière semi-autonome et doivent être chargés et déchargés à la main. Ils peuvent également être personnalisés.
Par exemple, une application médicale a nécessité l'installation d'une boîte fermée sur le VIA pour transporter des substances réglementées dans une usine. Les VIA convoyeurs et transporteurs de chariot fonctionnent de manière autonome. Par exemple, un VIA convoyeur communiquera avec la machine via une connexion Wi-Fi ou un trans-pondeur de données optiques pour confirmer qu'il est en position, et le convoyeur correspondant chargera ou déchargera les casiers. De plus, les intégrateurs développent des variantes, telles que les convoyeurs à chargement avant ou latéral, des convoyeurs doubles, à rouleaux ou à courroies, et bien d'autres.
Mesures. Quelle est la prochaine évolution des robots mobiles intelligents ?
Bruno Adam. Il reste encore quelques problèmes à résoudre pour la prochaine génération de VIA. Pour fonctionner dans des environnements complexes et étriqués, les VIA doivent par exemple être en mesure de calcu-ler des trajectoires complexes en prenant en considération la forme du véhicule et de sa charge. Cela leur évitera de rester bloqués dans une courbe étroite, par exemple. De légères améliorations du générateur de trajectoire pourraient entraîner des améliorations significatives du débit en améliorant l'agilité de la flotte de véhicules.
Un autre point à améliorer est la capacité de charge du VIA. Actuellement, le plus grandVIA LD d'Omron peut transporter 130 kg, ce qui est suffisant pour la plupart des applications. Cependant, dans le secteur de la boisson ou de l'automobile, certains clients auraient besoin de VIA avec de plus grandes charges utiles. Des VIA plus grands sont soumis à davantage de réglementations : plus leur taille augmente, plus les exigences en termes de sécurité augmentent. Mais cela viendra avec le temps.
Les futures générations de logiciels de gestion de flotte permettront également des flux de production plus complexes. Actuellement, le logiciel réagit selon l'état de la ligne de production. Le robot doit attendre que le logiciel de gestion le prévienne qu'une charge peut être récupérée. Avec la prochaine génération du logiciel, ce processus sera plus intelligent. Le logiciel de gestion calculera à l'avance les opérations et pourra positionner les VIA en attente d'une tâche à effectuer. Cela permettra d'améliorer encore la productivité, tout en prolongeant le temps de fonctionnement du VIA.
Des fonctionnalités supplémentaires permettront également d'ouvrir l'utilisation des VIA à différentes applications. Par exemple, les lecteurs de RFID et de codes-barres amélioreront l'intelligence du VIA et lui permettront d'effectuer davantage de tâches dans des entrepôts.