La société aixoise AP2E a développé un analyseur reposant sur une technologie de spectrométrie laser infrarouge, ne demandant aucun chauffage des lignes, ni traitement des échantillons.
Dans le domaine de l’analyse en continu des gaz à l’émission, la plupart des techniques de mesure mises en œuvre imposent un appareillage associé très complexe pour traiter les échantillons. Afin d’éviter les phénomènes de condensation des gaz corrosifs, il faut en effet utiliser des membranes de filtration en tête de cheminée pour enlever l’eau des prélèvements - ces membranes doivent être remplacées régulièrement - ou maintenir à la température du process (+180 °C ou plus) l’ensemble du système, depuis les lignes de prélèvements jusqu’à la cuve de mesure au sein de l’analyseur.
« Pour pallier les problèmes de maintenance, de dénaturation des échantillons et de limites de détection, ainsi que pour réduire les investissements nécessaires à la mise en place de lignes chauffées ou à l’utilisation de matériels Atex, nous avons développé le premier système complet d’analyse multigaz en continu des polluants à l’émission par spectrométrie laser infrarouge », annonce, Eve Obert-Scholefield, présidente de la jeune pousse française AP2E qui a dévoilé l’analyseur LaserCEM lors de la manifestation Analyse industrielle.
L’originalité de cet analyseur réside dans deux innovations brevetées : un échantillonnage à très basse pression développé par AP2E et une technologie laser infrarouge très haute définition issue de l’Université Joseph Fourier de Grenoble, avec qui le français a signé un contrat de licence mondiale exclusive. La technologie OFCEAS, pour Optical Feedback Cavity Enhanced Absorption Spectroscopy, utilise une source laser continue (non pulsée), d’où une grande stabilité de mesure, et balaie une plage spectrale pour qualifier et quantifier un échantillon.
Mesure d’une très haute résolution spectrale
« La méthode OFCEAS utilise le principe d’une cavité étendue associée à des miroirs de haute réflectivité pour accroître la longueur des trajets optiques jusqu’à une dizaine de kilomètres (au lieu d’une dizaine de mètres) et donc d’abaisser les limites de détection au ppb », explique Eve Obert-Scholefield. La principale originalité de la technologie OFCEAS est son principe de “Feedback” : une partie du rayonnement émis est renvoyée de la cavité vers le laser, permettant d’accorder le laser et la cuve pour créer un phénomène de résonance. « On obtient alors l’émission de longueurs d’onde d’intensité particulièrement forte et de largeur spectrale très fine. Il en résulte une mesure d’une très haute résolution spectrale », poursuit Eve Obert-Scholefield. Cette résolution assure une mesure directe sans risque d’interférences, quelle que soit la matrice du gaz à analyser (NO, SO2, NH3, N2O, CO, CO2, HCl, HF, H2S, H2O, etc.), à la différence des autres techniques laser infrarouges.
La seconde innovation porte sur l’échantillonnage des gaz via une sonde basse pression qui véhicule l’échantillon du point de prélèvement à l’analyseur. « L’utilisateur n’a pas à prévoir de système de traitement des prélèvements ou d’une ligne chauffée. Il n’y a également aucun risque d’absorption/désorption des composés et de condensation car on se situe en dessous du point de rosée : l’intégrité des échantillons est ainsi assurée », indique Eve Obert-Scholefield. Autres avantages, le faible débit d’aspiration (3 à 9 l/h au lieu de 30 à 40 l/h) permet d’obtenir des temps de réponse inférieurs à 200 s et de réduire l’encrassement du système d’échantillonnage. L’analyseur n’affiche par ailleurs aucune dérive de zéro ni dérive de la mesure (mesure absolue), d’où un étalonnage annuel et une maintenance réduite.